A 20 ans à peine, quatre jeunes femmes ont décidé de croire à la force d’une idée : celle d’une société nouvelle, respectueuse des différences, solidaire et engagée. Devenues les pionnières du Service Civique en France, elles ont fondé Unis-Cité et réussi, à force de courage et d’obstination, à faire passer une loi qui va mobiliser la moitié de la jeunesse de notre pays !
C’est l’histoire d’un rêve singulier. Nous sommes en 1994. Sur les bancs de l’ESSEC de Cergy-Pontoise, trois jeunes femmes se questionnent à propos de leur avenir. Elles s’appellent Marie Trellu-Kane, Julie Chénot, Anne-Claire Pache. Elles ont 20 ans et l’univers de l’entreprise ne les fait pas vraiment fantasmer. Idéalistes, elles aspirent à une société tolérante, où chacun serait en mesure d’innover, d’entreprendre, de trouver et de prendre sa place. Elles désirent avant tout que leurs études leur permettent de contribuer à rendre ce monde un peu meilleur. Qui a dit qu’un rêve ne pouvait pas devenir un projet de vie ?
Ce jour-là, Lisbeth Shepherd, une américaine de 22 ans débarque à l’ESSEC dans le cadre de la mise en œuvre d’un projet solidaire à l’étranger. Cette jeune femme fait découvrir aux étudiants l’expérience de City-Year, une association lancée dans les années 80 à Boston. City-Year – « Une année pour la ville » – a pour mission de rassembler des jeunes provenant de différentes communautés culturelles et sociales des Etats-Unis afin de leur offrir l’opportunité de consacrer une année de leur vie à des actions en équipe, utiles à la collectivité. Les trois jeunes femmes sont instantanément séduites par l’action de City-Year et ne tardent pas à se lier d’amitié avec Lisbeth. Pour le meilleur, et plus encore !
20 ans après! Julie Chenot à gauche de la photo – Se tiennent par les épaules : Lisbeth Sheperd, Marie Trellu-Kane (Présidente exécutive) et Anne-Claire Pache.
Se rassembler sans se ressembler!
Mues par la certitude qu’il est envisageable de se rassembler sans se ressembler, elles imaginent alors un monde où il est possible de faire se rencontrer des personnes qui, à cause de barrières sociales et culturelles, n’auront peut-être jamais l’opportunité de se croiser.
Un monde où ces mêmes personnes peuvent réaliser ensemble des missions utiles et fédératrices qui permettront en outre, de s’affranchir définitivement des préjugés sociaux, de développer des responsabilités que l’école ne permet pas d’acquérir.
C’est ainsi qu’en 1995, inspirées par le modèle de City-Year, et par le service civil américain AmeriCorps, les quatre amies deviennent les pionnières du Service Civique en créant l’association Unis-Cité.
Une association à but non lucratif, indépendante et laïque, qui organise et promeut l’idée d’un Service Civique en France.
« L’objectif d’Unis-Cité est que les jeunes entre 16 et 25 ans*, qu’ils viennent des beaux quartiers ou des quartiers difficiles, qu’ils aient ou pas un bagage scolaire, puissent se réunir autour de valeurs communes, en offrant 6 à 9 mois de leur vie aux autres, m’explique Isabelle Prats, Directrice de la Communication d’Unis-Cité. Six mois, c’est vraiment la durée minimum, ajoute-t-elle. En dessous de cette durée, il est impossible de proposer des missions qui s’avèrent utiles et génératrices de lien.»
Unis-Cité a donc décidé d’être au service d’une jeunesse aussi ambitieuse que généreuse, résiliente et lucide, portée par l’envie d’agir et de se dépasser. Une jeunesse qui a décidé de s’entraîner à croire à son avenir, convaincue que c’est elle aujourd’hui qui a le rôle le plus déterminant à jouer face aux changements de paradigmes que nous espérons tous.
Une jeunesse qui nous demande de lui laisser les clefs de sa propre existence, soucieuse d’amener la France vers le 21ème siècle sans attendre que la société lui dise ce qu’elle doit avoir envie de devenir.
Des personnes sans abri, aux personnes âgées isolées, en passant par des missions relevant de la protection de l’environnement, Unis-Cité permet à tous les jeunes qui le souhaitent, de sortir de leur zone de confort et de provoquer leur propre chance en allant à la rencontre des autres, tout en prenant soin des êtres et du monde autour d’eux.
Une année de « césure solidaire » entre la jeunesse et la vie d’adulte.
Cette année de Service Civique représente une véritable année de « césure solidaire » entre la jeunesse et la vie d’adulte, que Marie Trellu-Kane, Directrice de l’association, définit comme « essentielle » pour la construction de son avenir. « C’est en étant utile aux autres et au monde qu’on trouve un sens réel à sa vie, affirme-t-elle. D’ailleurs, tous les jeunes qui ont fait le Service Civique reconnaissent qu’Unis-Cité a été un accélérateur de changement dans leur vie. »
Pour que nos regards sur le monde évoluent, il est préférable de commencer par porter un regard neuf sur soi-même.
Cette année de Service Civique devient alors un outil précieux en matière de changement et de transformation de soi. « Imaginez si toutes les personnes deviennent plus ouvertes d’esprits, cela aura un effet inouï sur les mentalités dans notre pays » reconnait Isabelle.
Durant de nombreuses années, l’équipe d’Unis-Cité œuvre pour obtenir un soutien public et un cadre légal. L’enjeu majeur est de convaincre les politiques que cette association ne peut pas rester « une petite initiative citoyenne ».
Cette nouvelle forme d’engagement originale pour les jeunes connait une première reconnaissance avec le lancement du service civil volontaire, à la suite des émeutes des banlieues en 2005.
Il est regrettable d’attendre de vivre des situations dramatiques pour qu’une première prise de conscience s’opère au sein de la classe politique, pour faire bouger les lignes, et donner des moyens à ces initiatives génératrices de cohésion sociale.
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si au lendemain du 11 janvier François Hollande a déclaré vouloir renforcer ce qu’il appelle désormais le Service Civique Universel.
Améliorer la vie de milliers de personnes.
Pourtant, nous pouvons apprendre à aller vers l’essentiel par d’autres voies que celles des chemins de souffrance et des situations irréversibles.
Le Service Civique offre la démonstration quotidienne que notre pays peut reprendre confiance en lui-même et améliorer la vie de milliers de personnes sans bouleversement, ni conflit.
C’est la raison pour laquelle l’objectif de l’association est qu’un jeune sur deux prenne part au Service Civique d’ici à 2018.
Si Unis-Cité met en lumière les nouvelles forces vives dont la France fourmille, en lui donnant les moyens d’agir, c’est parce qu’elle incarne les valeurs d’une jeunesse qui souhaite avant tout se rapprocher, bien consciente que relier les mondes, briser les murs, et établir des ponts entre les communautés est la meilleure façon de sortir d’une impasse, et que les métamorphoses ne se font jamais seul dans son coin.
Une jeunesse qui a compris que s’ouvrir à la différence, et son ticket en or pour avoir un impact majeur sur ce que sera la société de demain, la sienne !
Mobiliser la moitié de la jeunesse de notre pays!
L’année dernière, 60 000 jeunes ont participé à cette aventure. En 2016 c’est 110 000 jeunes qui devraient être concernés. « Le plus dingue dans cette histoire, déclare Isabelle, c’est qu’à force d’obstination, et de travail quatre jeunes femmes de 20 ans ont réussi à faire passer une loi qui va demain mobiliser la moitié de la jeunesse de notre pays, autour du dénominateur commun de la cohésion, de la mixité et du faire ensemble. »
Quant à le rendre « obligatoire », Isabelle reconnait qu’il faudrait trouver plus de 750 000 missions utiles, « ce qui n’est pas encore envisageable aujourd’hui. Dans un premier temps, il est important de répondre en priorité au désir d’engagement des jeunes ! »
Loin d’être une utopie, cette « décision ambitieuse » permettrait que le Service Civique pour tous devienne la réalité de demain, pour peu que les responsables politiques prennent pleinement conscience des enjeux dont il est réellement question afin de bâtir ensemble une nation solide, autonome et solidaire !
Annabelle Baudin
* Jusqu’à 30 ans pour les personnes en situation d’handicap.
** Les volontaires en service civique reçoivent une indemnité mensuelle d’environ 573 euros et bénéficient d’une protection sociale et de formations.
Bonus des optimistes:
AGIR! Pour vous inscrire à l’une des séances d’information, c’est ici! Unis-Cité propose des milliers de missions de Service Civique, en équipe, dans des domaines variés (environnement, lutte contre l’exclusion, citoyenneté, handicap, culture…) Conditions : avoir entre 16 et 25 ans – jusqu’à 30 ans pour les jeunes en situation de handicap. Aucun diplôme n’est exigé.
Découvrir! Le clip d’Unis-Cité, »Volontaires ».
La chanson a été écrite par Julien, Manon, Sophie et Sarah, volontaires à Unis-Cité Strasbourg qui avaient envie de partager leur expérience du Service Civique. Sur la musique originale de la chanson « Banlieusards » de Kery James.
A lire ! « Changer le monde à 20 ans », Marie Trellu-Kane (ed. Cherche-midi)